Que nous apprend-t-il, le fait d’écrire ?
Je cite : "Avant tout autre chose, ça nous rappelle que nous sommes vivants et que ceci est un don, un privilège, plus qu’un droit.
Notre art, notre écriture ne peut, comme souvent nous souhaiterions qu’elle puisse, nous délivrer des guerres, des privations, des jalousies, de l’avidité, de la vieillesse ou de la mort, mais elle peut nous revitaliser, au milieu de tout cela".
Ce Book Talk met à l’honneur un auteur immense, en plus d’avoir été extrêmement prolifique : Ray Bradbury. Il s’agit non seulement du plus célèbre auteur de science-fiction de la deuxième moitié du siècle dernier, ayant produit des chefs d’œuvres tels « Fahrenheit 451 » ou « Chroniques martiennes » ; son activité s’est étendue à la poésie, au domaine théâtral et cinématographique en générant, par exemple, le scénario du film « Moby Dick », d’après une demande du réalisateur John Huston.
Et ce n’est pas tout ! Véritable Maestro de la synthèse poétique, il s’en sert pour écrire la petite perle dont je souhaite vous parler, « Le Zen dans l’art de l’écriture » : un recueil de douze essais, parus dans des revues tout au long de sa carrière d'écrivain, à partir de 1973. Un livret-culte, adopté par maintes universités et cours d’écriture créative partout dans le monde.
Ne vous attendez pas pour autant à une check-list à suivre au pied de la lettre (si ce n’est pas le cas de le dire !) pour devenir un écrivain à succès. Des conseils d’écriture et même des listes vous en aurez, certes : mais il vous faudra les distiller des souvenirs de vie de l’auteur, de ses nouvelles, de ses romans, de son humour.
Alors, si on ne peut en tirer du "prêt à consommer", à quoi bon lire cette oeuvre ?
Pas à grand-chose, si ce n’est connaître un humaniste sui generis pour connaître la merveille qu’est l’homme, connaître un amoureux fou de la vie pour aimer autrement et passionnément la vie elle-même, connaître l’art d’écrire et son pouvoir libératoire, thérapeutique, voire thaumaturgique.
Son processus créatif à lui, Bradbury dit que c’est « de la faute des chats », que ses idées lui viennent le matin, de la même manière des chats qui viennent à leur maître : en grimpant silencieusement sur le lit et en s’accroupissant au fond de la couette, comme des sentinelles ; en se faisant entendre simplement en regardant le maître, jusqu’à ce qu’il n’ouvre un œil et il les guette et qu’il ne se sente coupable pour les laisser mourir de faim … Idem pour les idées : elles lui arrivent silencieuses, à cette heure, ce « temps de personne » où on cherche à se réveiller et se rappeler de son prénom. Notions et impressions siègent alors au bord de son cerveau, lui chouchoutent à l’oreille et s’il ne se réveille pas, comme les chats, le forcent à se lever et s’asseoir à la machine à écrire, avant que l’idée ne s’envole ou bien elle ne meure de faim.
Cette vertu, cette capacité incroyable à « intensifier l’ordinaire », lui permet de rendre plus prégnantes ses paraboles et mêmes les anecdotes de sa vie prennent vie, une vie qui leur est propre. Mais c’est l’opiniâtreté, sa vraie recette : écrire mille mots tous les jours. Il est persuadé que sans ça, le monde, la vie nous rattrape et tente de nous dégouter et nous mourrons chaque jour un petit peu. Et c’est exactement de ça, d’une façon ou de l’autre, qu’on parle dans ce livre.
Ce que j'en retiens ...
Le storytelling n’est pas une chronique, c’est une forme de magie, qui élabore les concepts et les mots, en éveillant les émotions les plus vives. Et les émotions, en plus d’être responsables de nous activer, n’ont aucune connotation positive ou négative, elles sont toutes légitimes. De ce fait, « il existe une seule histoire qui mérite d’être écrite : la vôtre » R. Bradbury.